Aux portes de l'Espagne
Départ : Bayonne (chez Socorro)
Arrivée : Ustaritz (Gare) / Saint Jean Pied de
Port (Kaserna, rue d'Espagne)
Distance parcourue : 18,3 km
Podomètre :
22 301 pas
Cumul : 623 km / 740 783 pas
Météo : Couvert
mais lourd, chaleur moite. Bienvenue dans le Sud.
Rushes : 111 Go
Partir tôt sera décidemment une
notion purement espagnole, car là-bas les gîtes ferment le matin et la chaleur
rendra impossible les trajets l'après-midi. Partir tôt était mon réel espoir de
la matinée, car nous avions l'ambition de faire une partie de l'étape qui
s'annonce plate et jolie à pied/fauteuil, puis de prendre le train à Ustaritz,
la ville d'arrivée, afin de rejoindre Saint Jean Pied de Port dès ce soir.
Partir tôt restera de l'ordre du fantasme, car Socorro et Alain ont encore des
milliers de choses à se dire. J'admets que je n'ai pas eu la force ni l'envie
de les filmer, et je prépare plutôt les bagages afin d'essayer de gagner
quelques précieuses minutes sans les interrompre trop brutalement.
Il est donc quasiment midi
lorsque nous décollons, après avoir embrassé Socorro et nous être assurés une
quatorzième fois que la maison mitoyenne n'était pas en vente. Oui Alain, tu
reviendras, mais si tu veux passer à Saint Jacques avant, c'est tout droit et
c'est maintenant. Enfin c'est maintenant en tous cas, parce que tout droit,
disons que presque. Le GPS se découvre des élans fantaisistes, et ne connait visiblement
aucune nuance entre les notions de chemins "piétons avec escaliers"
et "vous possédez un quelconque type de roue, je vous mets donc en danger
de mort". Nous empruntons donc le bout de départementale le plus dangereux
de France et de Navarre (ouais, là c'est vraiment la région, donc on peut le dire
!), avant d'emprunter les bords cyclables de la Nive, ombragés de boisages et
effectivement forts sympathiques. Michel fait souvent sa promenade ou son
footing ici. Il nous accompagne sur une majeure partie du trajet, pendant que
je cherche un gîte pour le soir. La route est assez calme mais nous gardons un
rythme très soutenu dans l'espoir d'attraper le train de 15h10. Sans quoi le
suivant est à 18h30. Rien de dramatique mais nous préférerions passer
l'après-midi à visiter Saint Jean plutôt que sur le quai de la gare d'Ustaritz,
contre lequel nous n'avons certes rien mais qui s'annonce d'une richesse
culturelle limitée. Les deux derniers kilomètres sont les plus vicieux de nos
existences. Non, elles ne sont pas si longues, les côtes... mais elles sont pentues
sa m***, ******** ** ***** ** ******* ! Nous y laissons bras, jambes, poumons,
moral, injures, dos, tout, tout le reste, et la suite. Rien que d'y repenser,
j'ai encore envie de crier un bon coup pour faire passer l'énergie. Mais tout
le monde dort à présent, ça ferait désordre.
Nous arrivons tout de sueur et de
dégoulinance vêtus à la-dite gare à...15h09 !! On aurait voulu le faire exprès
que ça ne serait pas aussi bien tombé ! Je prie pour que nous soyons du côté du
bon quai - le vice de dernière minute qui nous rendrait haineux - mais, très
petite bourgade basque oblige...il n'y a qu'un seul quai ! C'est déjà ça de
gagné. Quelques minutes passent, et je re-prie pour que les abords de l'Espagne
soient fidèles à leur réputation de flexibilité sur les horaires côté retard...
On devient donc pieux quand on est pas hyper large en self-confiance. Je
vérifie à grand peine de réseau sur le site de la SNCF, qui n'indique que le
train de 18h30 dans cette direction. Bon. Nous sommes affamés, autant commencer
par occuper le temps en dégust... euh, en dévorant les sandwichs préparés par
Socorro ce matin. Après tout, il est bien ce quai pour y passer plus de 3h...
Non ? Non. Bon. Eh ben, on peut surement s'allonger faire une sièste sur les
bancs, alors ? Non plus en fait, ils sont coupés d'accoudoirs. Les traitres. Eh
bah on va ... entendre le train qui arrive ? Yahoo, merci les clichés ! Il est
15h30 bien sonnées, nous sommes tout juste en phase de digestion. Timing
finalement idéal, jolis paysages qui défilent, des vagues de pèlerins qui nous
aident à sortir du train à l'arrivée. En voilà de quoi nous remonter le moral !
Reste plus qu'à remonter toutes ces pentes pavées...
L'arrivée à Saint Jean Pied de
Port n'est pas une étape anodine. Haut lieu symbolique du chemin, toute la
ville semble vivre aux couleurs jacquaires. Rassurez-vous pour eux, le
potentiel commercial de cette situation a été tout à fait intégré au paysage.
Les ruelles pullulent de gîtes et de petits restaurants très goûtus (#référence
#mam #brotherhood #çaseditsurementpascommeçamaistantpis
#vousaussiçavoussouleleshashtags ?), de coquilles aux graphismes divers et de
pierre chargées d'Histoire. Nous nous rendons au gîte Kaserna, en plein centre
de la vieille ville, où nous sommes reçus par Martine et Bernard, bénévoles du
diocèse de Bayonne. Une douche salvatrice m'attend avant que je ne m'aventure
dans les ruelles où je ne fais qu'effleurer le potentiel photographique de
l'endroit, pendant qu'Alain reprend des forces sur la "chaise
d'escaliers" qui lui donne un petit air de dahut. Il est assez clair que
ces endroits ne sont pas exactement pensés pour les personnes en situation de
handicap, mais on finit toujours par faire avec ce qui nous est offert. Et le
sourire n'est jamais loin.
Le chemin de ronde est sublime
mais absolument impensable pour un fauteuil. L'Eglise est brute et
impressionnante, on sent chaque recoin chargé du poids des âmes de ceux qui
sont comme nous passés ici sur le chemin. La plupart commencent d'ailleurs le
pèlerinage depuis Saint Jean Pied de Port, d'où qu'ils viennent. D'où le nom de
la ville également. Les pieds, on saisit l'idée, et le port, c'est l'endroit du
départ, l'attache et l'horizon, tout ça toussa.
"Il n'y a que les fous pour
arriver de Paris à la force des bras !" Mais la force des bras commence à
se lasser malgré tout, et les dénivelés à venir sont prometteurs de danger et
de grandes difficultés. Nous commençons à réfléchir aux parties que nous
verrons depuis la vitre d'un car, à débuter par l'étape de demain, réputée pour
être l'une des plus difficiles du parcours. Rien que la "petite côte"
pour arriver au gîte a été dure à gérer, alors les Pyrénées... D'autant que la
douleur des deux mois qui viennent de s'écouler s'est réveillée d'un coup chez
Alain depuis avant hier où nous avons repris la route. "Faire le chemin
d'accord, mais le but c'est d'arriver vivant et de rentrer après, quand même".
Et puis sur les 800 km qui nous séparent encore de Santiago, nous trouverons
bien assez d'occasions d'affiner nos muscles lorsque nous en sentirons le
besoin.
A suivre donc, nous mêlerons en
tous cas la prudence et la raison au défi auquel nous tenons tous deux toujours
autant. En parlant de défi, c'est nos amis Sébastien & Didier qui nous
rejoignent en fin de soirée, à l'issue de leur journée de repérage pour celui
que s'est lancé notre cycliste préféré. Pour rappel, Sébastien parcourra le 29
Septembre la bagatelle de 650km en 30h, afin de récolter des fonds pour une
famille dans laquelle les quatre enfants et la maman sont atteints de divers
handicaps. C'est demain qu'ils rencontrent la famille en question, pour leur
exposer le projet. Mon âme de vidéaste aurait été bien tentée de les y
accompagner, mais ce n'est pas exactement sur la même route. On pense à vous et
on sera là le 29 les amis !
La tradition des grandes tablées
de pèlerins, bien connue des gîtes du chemin, commence ici. Nous sommes logés
avec trois autres français, une allemande et sa famille d'Alaska, un italien,
un missionnaire hongrois, et j'avais envie d'ajouter un bout de phrase. Seuls
les monsieurs italiens et hongrois ont quelques notions d'anglais en plus de
leur langue maternelle, et la dame allemande qui vit depuis 50 ans en Alaska
également. Et encore, elle n'entend plus très bien, ce qui est certainement la
raison pour laquelle elle me félicite pour mon anglais et me demande si je suis
Allemande ou Italienne en m'entendant traduire sur quatre langues tous les
récits de voyages de ce joli monde qui parle d'ailleurs parfois tous un peu en
même temps (#tropDeFlaterries #maisçaFaitPlaisirQuandMême #mêmePlusDeMigraine).
J'ai surtout de la chance d'être entourée de ces langues-ci, car ce sont les
seules que je maîtrise à peu près... C'est en Espagne entourée des Coréens qui
semblent cette année bien nombreux que nous allons vraiment rigoler.
Mais nous y penserons demain.
Demain nous serons le 17. Le 17 Juin. Déjà deux mois...
Bravo à tout les deux vous êtes arrivés à la fin du trajet français en nous faisant rêver, reposez vous bien cette nuit .biz courage
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